Des grains de sable dans la belle synergie…?

Que nous enseigne le discours de Jacques Gillot ? Tout simplement que la synergie dont on nous a tant rabattu les oreilles depuis 2004 n’était donc qu’un mirage dans un désert, une comédie politicienne? On ti lélé pou gaga vwè ? De là à prédire un combats de coqs dans l’hémicycle transformé en pitt, une dislocation entre les deux hommes dans les prochaines heures, les jours à venir, ce serait jouer les diseurs de mauvaise augure ! Wait and see !

Tous les signes avant-coureurs annonçaient tout de même ce à quoi nous assistons aujourd’hui en dépit  des déclarations des uns et des autres pour prétendre qu’ils étaient sur la même longueur d’ondes. Il y a un truc qui ne tournait pas rond depuis longtemps. Jodi’la mango mi! Les observateurs bien avisés, la presse s’en étaient fait l’écho à maintes reprises. La vie politique est faite de hauts et de bas. En Guadeloupe, elle est à certains égards au ras des pâquerettes quand on observe les retournements de vestes – il faut croire que certains ont une garde robe assez garnie- les palinodies, les renoncements, l’inconstance des positions, l’inconsistance du discours, les impostures, l’absence de vision  de certains dirigeants que les électeurs ont mandatés pour prendre en charge une partie des problématiques, l’organisation de la cité, l’action efficace, l’intuition politique, la hauteur de vue, la capacité à se fixer des objectifs clairs et à se donner les moyens pour les réaliser…en matière d’indépendance énergétique, de tendre à renverser la balance commerciale malheureusement ultra déficitaire, de réduction de la dépendance économique, la recherche des secteurs créateurs d’emploi pérenne afin de réduire le nombre de personnes au chômage et/ou dépendantes de subsides sociales pour ne prendre que ces quelques exemples tout à fait concrets.
Il est clair comme du cristal de roche que Jacques Gillot et Victorin Lurel ne partagent pas la même analyse, la même lecture, une vision convergente de la Guadeloupe et donc ne sont pas du tout en synergie. Du moins, en ce qui concerne le destin politique de la Guadeloupe. Tout porte à le croire. Il y a bien évidemment un ou des grains de sable dans la machinerie et les grincements de Gillot sont là pour en attester. Nous assistons à un duel au sommet. Une lutte pour le pouvoir. L’un a mis sabre au clair tandis que l’autre a décidé de frapper d’estoc et de taille. Dé mal krab pa ka rété adan menm tou’la!
Gillot semble plus enclin à aller vers une collectivité unique dans le cadre d’une évolution statutaire. Dans l’extrait du discours rapporté par CCN il soutient : »Une vision qui contribue à simplifier et rationaliser l’organisation des collectivités locales et clarifier leurs champs de compétences !Une vision qui permettre l’émergence d’une collectivité unique doté d’un exécutif collégial en lieu et place de la région et du département. » Le quotidien France-Antilles du 19 octobre 2010 avait fait état dans un papier de la position du GUSR.
A contrario, Lurel est partisan d’un changement, des aménagements des institutions. C’est ce qu’il a affirmé le 06 septembre 2010 dans son « Discours de politique générale : Mandature 2010-2014 » « Assemblée unique ou collectivité unique ? Combien d’élus ? Quel mode de scrutin ? Quel équilibre des pouvoirs ? Quels contre-pouvoirs ? Quelles compétences ? Quelles ressources ? […] Mes positions sur la question du statut, c’est-à-dire du régime législative, sont connues. Je les ai consignées dans un programme électoral qui engage toute la majorité que j’ai l’honneur de conduire et qui a recueilli plus de 56% dans une élection. La Guadeloupe doit, pour nous, demeurer dans le droit commun de l’article 73 de la Constitution. Nos compatriotes ont constamment réaffirmé leur attachement à défendre notre identité et nos spécificités dans ce cadre. L’évolution que nous proposerons ne sera clairement pas, et je l’affirme haut et fort, un changement de statut. Il s’agira simplement d’une évolution de nos institutions puisque le gouvernement nous oblige à faire un choix. Dans ce cadre donc, et dans ce seul cadre, Jacques Gillot et moi, sommes favorables à une assemblée unique avec maintien de la région et du département dirigés par un seul exécutif, avec un mode de scrutin mixte (mêlant à la fois proportionnelle pour permettre l’expression du pluralisme et scrutin majoritaire pour garantir une certaine stabilité). »
Dans la contribution de Victorin Lurel au Projet guadeloupéen de société, il affirme selon « L’attachement à la République, au département et à la région n’exclut pas des aménagements institutionnels du type »assemblée unique ». Assemblée unique à laquelle il  était radicalement opposé à l’occasion du référendum de 2003 par la diffusion de ce tract
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Après le Congrès du 28 décembre 2010 et la résolution demandant une adaptation de la réforme territoriale, l’escapade au coeur de l’hiver à l’Elysée, l’affront… Victorin Lurel  a déposé une proposition de loi n°3585 « tendant à adapter la loi de réforme des collectivités territoriales aux caractéristiques et contraintes particulières de la Guadeloupe» dont Mme Pau-Langevin a rendu un rapport consultable sur le site de l’Assemblée Nationale.
Si on remonte à 2010, dans un rapport par Victorin Lurel « La réforme territoriale  en Guadeloupe  Enjeux et perspectives » 1)  au nombre des « inconvénients de l’assemblée unique » on lit à la page 17 : « Si la réforme « Balladur » n’était finalement pas mise en œuvre au plan national (éventualité d’une remise en cause par la gauche si elle arrivait au pouvoir en 2012), elle placerait la Guadeloupe dans une situation distincte du droit commun. Pour parer toute éventuelle critique à ce sujet, il est possible d’adapter le calendrier et de rester dans le statu quo en attendant 2012 »
Plus loin, dans la partie consacrée aux « Avantages de l’assemblée unique » du même rapport, il est dit : « En cas de remise en cause de la réforme « Balladur » en 2012, la Guadeloupe conserverait, avec l’assemblée unique, le département et la région ce qui ne serait pas le cas avec la collectivité unique ; »
Dans le projet  du Parti socialiste, dans un document intitulé : « Les socialistes et les Outremers », il est dit à la partie 4- En matière institutionnelle, respecter la volonté des populations, accroître la décentralisation »
« Nous n’avons aucune raison de revenir sur  les principes fondamentaux de la loi d’orientation du 13 décembre 2000, votée à l’initiative du gouvernement de Lionel Jospin et que Jacques Chirac, après les avoir combattus, s’était résolu  –pour partie du moins – à introduire dans la Constitution.
Ces principes sont simples : oui au droit à l’évolution statutaire dans la République à  condition que soit recueilli, par référendum, le consentement préalable des populations intéressées.
Nous ferons vivre ces principes en revenant à l’esprit qui y présidait alors : des consultations claires et loyales ce qui suppose que les grands lignes du changement statutaire proposé soient connues avant la consultation et non ultérieurement.
Droit à l’évolution dans la République comme droit à privilégier le droit commun, en évitant que ce dernier ne conduise à des situations aberrantes, comme tel serait le cas si devait prospérer le projet gouvernemental du « conseiller territorial », réforme que nous avons promis d’abroger en 2012. »
Donc, les dirigeants du parti socialiste raisonnent en termes de « droit à l’évolution statutaire » tandis que Victorin Lurel, un des membres est résolument opposé à tout changement statutaire. Confère le tract de 2003 du «front républicain pour le non ». Confère le « Discours de politique générale » de Victorin Lurel ». Serait-il en désaccord avec cette proposition ? Evolution statutaire, changement de statut, changement institutionnel… Ce ne sont pas des notions abstraites mais le choix de l’un et/ou de l’autre auront une portée décisive dans  nos rapports avec la France, l’administration de la Guadeloupe, la vie des Guadeloupéens…Donc, afin de permettre la clarté du débat, pour faire exister un débat contradictoire pourquoi les protagonistes  dudit « projet guadeloupéen de société» n’ont-ils pas mis en place tous les  « outils et supports de communication » prévus dans la proposition de méthode,  à savoir:
« Une campagne de communication de grande envergure impliquant fortement les médias traditionnels devra être mis en œuvre en sorte de créer les conditions optimales, du débat, de l’information permanente et de l’implication personnelle de l’ensemble des citoyens.
Un partenariat spécifique sera noué en ce sens avec les médias locaux, qu’il s’agisse du service public ou des médias de proximité.
Au-delà, il conviendra  également de favoriser le recours aux modes de communication et de débat propres à notre société fortement marquée par la tradition orale (« sénat », discussions sur les lieux de loisirs, de travail, dans les « koudmen »…)
Tous les moyens classiques et modernes de communication devront ainsi être mis à contribution, et notamment (liste non exhaustive) :

  •  Brochure explicative : « Pour un projet guadeloupéen de société »

–          Contenu : présentation de la démarche, étapes, calendrier global, thématiques abordées
–          Mise à disposition dans les lieux publics
–          Tirage : 200 000 ex.

  •  Journal du projet guadeloupéen de société

–          Présentation des thématiques et compte rendu régulier de l’évolution de l’élaboration du projet

  •   « Livre blanc du du projet

–          Il s’agira de garder une trace de l’ensemble du travail effectué pour aboutir au projet finalisé

  •  Site Internet dédié au projet guadeloupéen de société

–          Rubriques : présentation de la démarche, commentaires, questions-réponses, calendrier des réunions, questionnaires…
–          Mise à jour en temps réel »
Beau programme. Mais alors depuis 2009, qu’est-ce qui a empêché aux initiateurs du fameux projet d’agir et de mettre en œuvre tous ces dispositifs afin de recueillir les opinions, commentaires, contributions, réflexions, questions des Guadeloupéens? Nous serions déjà loin depuis tout ce temps…en route pour des jours meilleurs…Mais au lieu…
Aujourd’hui, à la veille de la tenue d’un congrès dit d’orientation, on nous invite à transmettre notre donner notre avis relatif à la « Contribution au débat du XIe Congrès des élus départementaux et régionaux« .  Depuis le temps que l’on nous promet de donner « La parole aux citoyens! Construisons ensemble un projet guadeloupéen de société« ?
Rapport_au_Congres_7.05.09
Pour lire la résolution du Congrès du 24 juin 2009 au format jpeg, click droit et ouvrir dans un nouvel onglet puis zoomer.

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